A chaque métier son apprentissage linguistique
S’améliorer en anglais et en néerlandais est-il un chemin vers l’emploi? Oui, sans aucun doute. Mais il est important de garder en tête lors de son apprentissage qu’à chaque métier correspond une utilisation différente de ces deux langues.
Les compétences linguistiques des personnes en recherche d’un emploi sont capitales. Par exemple, en 2016, 52,7% des offres d’emploi reçues par Actiris affichaient des exigences linguistiques explicites. Et ces pourcentages augmentent encore lorsque les embauches sont prises en main par des bureaux de recrutement. Pourtant, sur le terrain, les candidats sont toujours trop peu nombreux à s’adapter à cette demande du marché. Par exemple, selon Actiris, seulement un chercheur d’emploi sur cinq a au moins des connaissances moyennes en néerlandais. C’est d’ailleurs dans le but de répondre à cette problématique que l’organisme régional a mis en place une large campagne pour inciter les Bruxellois à améliorer leur niveau en prenant un ambassadeur de marque pour soutenir cette démarche: Vincent Kompany.
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L’initiative ne peut être qu’applaudie. Mais poussons la réflexion plus loin. Car l’apprentissage d’une langue dépend de l’usage que l’on en fait dans son quotidien professionnel. L’anglais que pratiquera un réceptionniste pour accueillir des clients dans un grand hôtel bruxellois sera bien différent de celui qu’utilisera un électromécanicien lisant un manuel dans la langue de Shakespeare pour réparer un moteur électrique. Le néerlandais utilisé par un commercial pour vendre ses produits à des clients flamands sera plus sophistiqué que celui utilisé par un chauffeur de camion qui se rend de temps en temps en Flandre pour effectuer une livraison.
Les différences entre les secteurs
Pour cette thématique, il est intéressant de se plonger dans les chiffres des offres d’emploi reçues par Actiris. «Selon le domaine professionnel et la fonction énoncée dans l’offre d’emploi, les connaissances linguistiques requises peuvent varier considérablement tant en ce qui concerne la nature (orale, écrite) que leur niveau. Ainsi, il est demandé dans certains cas d’être parfaitement bilingue tandis que dans d’autres cas, une connaissance élémentaire des deux langues nationales est suffisante, explique Jan Gatz, porte-parole d’Actiris. Les exigences sont surtout plus importantes pour les professions nécessitant des contacts avec des clients.»
Parmi les secteurs qui requièrent le plus fréquemment des compétences linguistiques, on retrouve l’ingéniorat et les sciences appliquées (87,8% des offres d’emploi stipulent des exigences linguistiques), l’informatique (79,6%), la science (78,2%), la gestion (76,9%) et enfin l’économie, la finance et le droit (71,3%). D’autres secteurs requièrent par contre nettement moins de compétences linguistiques, comme celui de l’enseignement et de la formation (21,8% des offres d’emploi), de la médecine, du paramédical (26,4%), de l’imprimerie (25,9%), de l’agriculture, de l’horticulture, de l’élevage, de la chasse et la pêche (29,5%).
Des enseignements différents
Au-delà du niveau demandé, c’est aussi la finalité recherchée dans le cadre de la formation qui varie selon les métiers. Si chaque métier entraîne des besoins linguistiques différents, Véronique Amand, responsable «langue» au Forem, pense qu’il est important d’acquérir au moins une base dans la langue. Et ce pour ensuite la perfectionner selon le domaine dans lequel la personne en recherche d’emploi veut évoluer: «Nous commençons par travailler le vocabulaire, la grammaire… les bases en orientant l’élève vers des activités liées au bureau. Tout le monde doit pouvoir répondre à un courriel, répondre au téléphone… Nous travaillons aussi de façon différenciée dans le cadre de l’apprentissage de vocabulaire spécifique: chaque personne travaille alors son propre dossier afin d’améliorer son profil selon ses besoins. Des solutions de stage en entreprises à l’étranger sont développées tout comme des cours à l’étranger. Nous prévoyons également des exercices pratiques et de l’apprentissage de vocabulaire spécifique à la profession. Car ce qui est important dans une langue, c’est de savoir pourquoi on l’apprend. Et pour répondre à cela, rien n’est plus efficace que la mise en situation.»
Sur les bancs de l’université, le défi est le même. Comment arriver à adapter les cours d’anglais, néerlandais et d’autres langues à la multitude de métiers qui sont enseignés? Tout comme dans le cas du Forem, les cours sont toujours plus adaptés aux profils particuliers des élèves: «L’université ne doit pas répondre aux besoins de telle ou telle entreprise. Elle se pose la question de savoir, globalement, dans telle filière et telle profession, quelles sont les compétences nécessaires au moment d’entrer sur le marché du travail», explique Dan Van Raemdonck, chargé de mission pour les langues à l’ULB. Ce dernier revient sur l’importance croissante que les cours de langue prennent dans les cursus universitaires: «Il n’est pas simple d’inclure des cours de langue dans des programmes déjà bien chargés… Pourtant, de nombreuses branches le font, ce qui est la preuve que les langues sont importantes. Pour arriver à coller au mieux aux besoins spécifiques, nous travaillons avec des cours à objectifs. Il s’agit par exemple de cours pour maîtriser l’anglais scientifique, l’anglais du business… Cela entraîne la création de très nombreux cours, mais ces démarches sont importantes pour les élèves. Comme le néerlandais, qui reste une nécessité dans de nombreux secteurs.»